De la science à l’art du fartage
Le fartage des patins de traîneau n’est pas simplement une pratique pour faciliter la glisse, c’est véritablement une science qui tient compte de la température et du degré d’humidité de la neige. Frédéric Borgey, handleur de sa femme Elsa a porté ce savoir au rang d’art.
Avant chaque départ de course, il va prendre la température de la neige afin de s’assurer qu’il a le fart adapté à la situation météo. Une situation qu’il a, au demeurant, anticipé la veille. « J’ai toujours trois paires de patins prêtes, une pour +4°-4°, une pour -5° -10°, et une -11° -15° » explique ce passionné de mushing aux petits soins avec sa grande sportive, musher professionnel, comme avec leurs athlètes à poils.
Sa science, il l’a acquise en observant et en analysant. « Avec le frottement on réchauffe la neige, donc on crée des micro gouttelettes sur lesquelles le patin roule. Et il roule d’autant mieux que la semelle est hydrophobe et chasse l’eau » poursuit le Savoyard parti avec Elsa en Suède « pour trouver du froid ».
Il précise : « plus la neige est froide, moins elle est humide et les cristaux de neige ont alors des dentrites (ndlr petites pointes dures). Il faut donc un fart qui les casse pour éviter que cela accroche à la semelle ». C’est nécessaire sur de la neige à -10° par exemple.
Son expérience l’a amené à constater qu’il est essentiel de préparer les patins à l’avance, car il faut laisser au produit le temps de polymériser avec la fibre de verre qui enrobe l’ossature bois, base des lames.
Fer à farter en main, chauffé à 150°, Frédéric Borgey approche son cube de fart au fer, au dessus du patin. La cire s’écoule en gouttes sur la semelle qu’il repasse avec soin pour favoriser la pénétration du produit dans les couches précédentes. « Il faut au moins une nuit pour que cela polymérise ». Les gouttes de cire ont disparu, le patin semble lisse mais l’opération est loin d’être terminée.
« En fait avant la course on gratte ce qui a été mis la veille, on brosse, on essuie au chiffon et au papier de soie » et lorsque le patin ne retient plus une gouttelette d’eau versée pour tester son hydrophobie, l’expert sort sa petite boite de poudre magique, et comme s’il salait avec minutie un plat, il en verse un nuage sur une feuille de soie et frotte « juste au centre du patin, là ou ça force ». On voit que cette poudre hydrophobe est très précieuse, comme nous le confirme d’un clin d’oeil Elsa…
« Elle ne m’a jamais dit que ces patins ne glissaient pas » ponctue Frédéric avec fierté avant de conclure : « de faire tout cela, ça me rassure, ça me destresse. J’ai le sentiment d’avoir fait tout ce qu’il fallait pour qu’elle parte dans de bonnes conditions » .